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Entretien avec Pierre Perez, initiateur du programme Ordi 3.0

Il y a une quinzaine d’années naissait l’opération Ordi 2.0. Des associations, dont Villes Internet, et des ministères décidaient alors la création d’un programme national de collecte, de reconditionnement et de distribution de matériel informatique à destination de personnes en situation de difficultés économiques et sanitaires. Le volet « développement durable » était alors secondaire, mais néanmoins important.

Pierre Perez, aujourd’hui, chargé de projet Handicap et Numérique à la Direction générale déléguée Numérique de l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT), est à l’origine de ce projet.

 Villes Internet : Quelle est la genèse de l’opération Ordi 2.0 devenue Ordi 3.0 ?

Pierre Perez : Nous étions dans les années 2000 et avions un objectif : la lutte contre la fracture numérique. Nous voulions également promouvoir l’insertion par l’économie et enfin, déjà, défendre le développement durable. En effet, nous avions déjà conscience que toute nouvelle machine achetée est destructrice pour l’environnement. Ne pas fabriquer un nouvel ordinateur c’est éviter de diffuser environ 500 kg de gaz à effet de serre, de gaspiller 3 500 litres d’eau douce, d’extraire 1,5 kg de minerais …

C’est pour cela que nous avons provoqué la création de cette filière de collecte, de reconditionnement et de redistribution, à bas coûts, d’équipements électriques et électroniques de seconde main en attribuant un label national aux structures permettant, ainsi, les usages du numérique par et pour le plus grand nombre, dans une démarche d’économie solidaire, circulaire et de qualité environnementale.

 VI : Qui portait ce projet ?

Ce dossier était porté par la Délégation aux Usages de l’Internet devenue ensuite l’Agence du Numérique, structure intégrée depuis le 1er janvier 2020  à l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT). Jusqu’à récemment, elle instruisait le dossier déposé par une structure candidate à la réception du label. Puis, une commission statuait sur l’attribution du label.

 VI : Les résultats ont-ils été au rendez-vous ?

Oui, les chiffres sont plutôt intéressants. Au début de l’année 2020, plus de 190 structures (300 emplois, 10 millions de chiffre d’affaire par an) assurant le « réemploi social » de 300 000 ordinateurs par an ont ainsi pu être labellisées.

En 2019, les réflexions sur les évolutions nécessaires à un de changement d’échelle de ce programme ont abouti à la proposition d’une stratégie multi-partenariale fondée sur une société coopérative d’intérêt collectif (Scic) pour optimiser au mieux les opérations de collecte, de production et de réemploi solidaire. Je suis donc heureux qu’Ordi 3.0 rejoigne, aujourd’hui, le monde de l’économie sociale et solidaire et qu’il soit dorénavant porté par la Scic World.Coop Consortium (http://world.coop). Cela permet de favoriser le travail de proximité, les entraides et les synergies en matière de collecte, de logistique, de stockage, de développement ou de financement d’activités… Le projet renait, c’est une bonne chose : il s’agit maintenant de développer le « coopérativisme de plate-forme »

VI : quelles sont les perspectives du projet ?

Le programme, en lien, notamment, avec l’Institut du Numérique Responsable (https://institutnr.org) et l’APF France handicap devient aujourd’hui ORDI3E-REEEBOOT qui s’inscrit dans la continuité de la filière nationale Ordi 3.0, ambitionne la constitution d’un réseau de plateformes coopératives interrégionales d’appui aux structures locales de collecte, reconditionnement et réemploi socio-écologique des équipements électroniques et électriques (3E) offrant des services mutualisés de conseil, de formation et d’applications numériques spécialisées, à haute valeur ajoutée. Il ambitionne, notamment, un déploiement progressif sur 2020-2021 en Bourgogne-Franche-Comté, en Normandie et en Hauts-de-France.

 

Par Anna Mélin