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Les logiciels libres dans les collectivités locales

Logiciels libres et services publics

Il est fréquent que les générations qui se succèdent aient l’impression d’inventer de nouveaux concepts en en changeant les noms, la présentation ou la communication. Le numérique n’échappe pas à ce mouvement, bien au contraire. On nous parle de médiation numérique comme d’une idée inédite et révolutionnaire, quand elle existe depuis de nombreuses années déjà. De même, il serait possible de croire que les logiciels libres auraient vu le jour ces dernières années, à la suite de l’élan novateur incroyable des startups nations. Alors qu’ils ont vu le jour dès les années 1960, sans en porter le nom, libres sans le savoir. 

Villes Internet consacre un dossier à sujet, outil démocratique central de l’Internet citoyen. Nous reviendrons sur l’histoire des logiciels libres et leurs définitions avant d’aborder l’usage qui en fait par les services publics et les collectivités locales en particulier.

 

Épisode 3 : les logiciels libres dans les collectivités locales

Que ce soit pour des raisons économiques, idéologiques ou techniques, les collectivités locales se lancent de plus en plus dans le mouvement des logiciels libres. L’utilisation des logiciels libres par les agente·es des services publics contribue à développer une approche fonctionnelle de ces outils plutôt que par les marques. Néanmoins, comme toute évolution, celle-ci pose de nombreuses questions, notamment en termes de développement interne. Le service public doit-il rester client des éditeurs de logiciels ou devenir acteur ? Est-ce un gage d’indépendance ? Quelle serait une action vertueuse d’une collectivité locale en matière de logiciels ?

De la vertu en matière de logiciels

Les élu·es des collectivités locales ne sont pas toutes et tous des spécialistes des questions numériques. Pourtant, les décisions qu’ils et elles prennent engagent leurs concitoyens dans des directions différentes, selon les choix qui sont faits. Que serait une utilisation vertueuse des logiciels par une collectivité locale ?

Les intérêts d’utiliser des logiciels libres sont nombreux. Le fait que le code soit ouvert et donc auditable permet qu’une communauté d’utilisateurs et utilisatrices assure la protection de l’outil. En matière d’archivage, le libre est un atout important. Si les élu·es veulent faire en sorte que leurs archives soient consultables sur un temps très long, en détenant le code source ils s’assurent la possibilité légale et technique d’y avoir accès. De plus en plus de services sont mutualisés au sein des intercommunalités. Mutualiser le développement d’un outil pouvant servir à plusieurs communes est un atout important du logiciel libre. D’un point de vue technique, détenir le code source d’un logiciel permet à la collectivité de pouvoir le modifier elle-même lorsqu’elle souhaite le faire évoluer. De même, elle peut obtenir des informations fiables sur la sécurité de l’outil et la protection des données personnelles.

Politiquement, une collectivité locale qui passe aux logiciels libres contribue au mouvement du libre et offre une transparence à ses habitants sur les algorithmes qui sont utilisés. 

Enfin, dans l’évolution juridique sur la publication des algorithmes de décision, l’administration doit être capable d’expliquer les algorithmes mis en œuvre. Ainsi, les citoyens et citoyennes qui réclamaient depuis longtemps que le fisc communique le code source de son logiciel de calcul de l’impôt sur les revenus ont  finalement obtenu gain de cause devant la justice en 2016. C’est ainsi qu’est né openfisca, moteur de calcul libre et ouvert qui permet de modéliser le système socio-fiscal français de manière collaborative et transparente. L’accès à cet outil a permis le développement de nombreux dispositifs permettant à des collectifs de démocratiser les questions fiscales.

L’usage des logiciels libres par les collectivités locales

Les services publics locaux sont souvent à la pointe de l’innovation, la question des logiciels libres n’échappe pas à cette dynamique. Les exemples d’utilisation ou de développement de ces outils sont nombreux et dans des domaines très variés. Les collectivités utilisent des logiciels bureautiques généralistes comme le traitement de texte et tableur, les mail, les navigateurs internet avec Libre office, Thunderbird, Firefox, etc. Mais également des logiciels métiers très spécifiques aux collectivités : SIG, concession cimetière, gestion des listes électorales, etc., avec par exemple Addulact. Les services en ligne comme les portails famille, la relation citoyenne, etc. sont également concernés avec les outils Publik, CapDémat, Connecthys, Citiviz, etc. De même, il existe des outils participatifs libres, soit des outils « génériques » de communication comme mattermost ou des expériences plus spécifiques #civictech comme loomio, decidim, democracyos, etc.

Les villes Internet labellisées sont précurseures parmi les précurseurs. 

Montesson (78) @@@@2021  a ainsi déployé un système d’information géographique libre et Istres (13) @@@@2021  a fait le choix de l’outil libre Maarch pour la dématérialisation des ses courriers depuis septembre 2008 et pour sa suite bureautique. La collectivité des Abymes (Guadeloupe) @@@@ 2021  utilisait jusqu’à maintenant le pack Microsoft Office, mais les différentes versions allant de 2002 à 2016 impliquaient des formats différents et parfois une incapacité à exploiter certains fichiers reçus. Une migration vers les logiciels libres a été alors décidée. Elle est passée par une sensibilisation et formation des utilisateurs, utilisatrices et enseignant·es et l’installation sur tous les postes (ville et écoles) de la suite logicielle « LibreOffice ». À Aix-les-Bains (73) @@@@@2021  la direction des systèmes d’information a déployé en interne différentes solutions métiers et de gestion du service informatique basées sur des produits open source. La DSI, pour son propre fonctionnement, privilégie non seulement les serveurs Linux (distribution Ubuntu) mais utilise au quotidien les outils suivants : GLPI (gestion du pôle helpdesk…), OpenERP (gestion du fonctionnement du service : congés, stock, gestion de projet…), Nagios (supervision du réseau et du SI), SpagoBI : génération du tableau de bord de la DSI et plusieurs autres. Par ailleurs, des solutions métiers sont déployées auprès des services municipaux comme OpenElect pour la gestion des élections, OpenCourrier pour la gestion du courrier, OpenCimetière, etc. En 2015, la Ville a mis en place l’outil open source Owncloud pour permettre le partage de gros fichiers et Open Mairie remplace désormais Doodle. En début d’année 2016, la messagerie électronique est entièrement passée sous Zimbra.

Les exemples sont nombreux et illustrent parfaitement que les collectivités locales ont pris le chemin du mouvement du libre, pour les raisons que nous avons évoquées lors des trois épisodes de ce dossier. L’étape d’après serait que le service public programme ses propres outils. Nous en sommes encore loin.

 

Vous êtes élu·e ou agent·e d’une collectivité adhérente de Villes Internet et vous souhaitez contacter vos paires afin d’échanger sur ce sujet ? N’hésitez pas à consulter l’Atlaas dans lequel vous trouverez toutes les coordonnées de vos paires. Votre collectivité n’est pas encore adhérente ? Il est encore temps d’y remédier, cela se passe ici 👉 🏼 http://www.villes-internet.net/site/adherer/

 

Dossier spécial : les logiciels libres

Par Anna Mélin